Les problèmes de l’autoédition

RML

13 février 2025

Après vous avoir parlé des avantages de l’autoédition, il m’apparaissait juste de vous décrire ses inconvénients ! Et comme vous allez le voir, il n’y en a pas peu !

Le premier désagrément qui est le corollaire de la première qualité (vous savez, celle qui vantait le fait d’avoir le contrôle de son livre de bout en bout !), c’est que vous êtes seul ! Mais quand je dis seul, c’est seul. Vraiment seul. Pas seulement quand vous écrivez. Vous êtes seul à chaque instant de la création, de la diffusion, puis de la vente de votre livre. Et je vous assure que, parfois, il y a de quoi devenir dingue !

Alors, faisons un petit tour panoramique ensemble des 10 points les plus sensibles et les plus rebutants de l’autoédition !

Manque de soutien professionnel :

En autoédition, tu dois gérer tous les aspects de la publication, y compris l’édition, la conception de la couverture, le marketing et la distribution. Cela peut être accablant, surtout quand tu n’as pas d’expérience dans ces domaines.

Premièrement, tu n’as pas d’éditeur pour te conseiller. Certains peuvent percevoir le regard d’un éditeur professionnel comme une contrainte pesante qui les oblige à réécrire, à modifier, à transformer leur œuvre. Il n’en reste pas moins qu’il est précieux, compte tenu des attentes du lecteur, du milieu de l’édition, etc.

Il en va de même pour la correction et la relecture. En édition traditionnelle, les correcteurs traquent tes coquilles, tes fautes d’orthographe et de grammaire, tes incorrections, etc. Ici, tu seras tout seul. Au mieux, tu te paieras un correcteur/trice, au pire, tu auras des amis généreux et bienveillants.

Et c’est la même chose pour l’objet « livre » lui-même ! Qui va dessiner ta couverture ? Qui va mettre en page l’intérieur de ton livre ? L’auteur ne pense pas forcément à ces « détails », qui sont pourtant la base de l’expérience du lecteur. Là encore, où tu te lances tout seul, ou tu fais appel à un professionnel à tes frais.

Pour le marketing et la promotion, c’est encore pire ! Te voilà devant l’Everest ! D’autant plus que, la plupart du temps, tu n’y connais vraiment rien dans ces domaines et que tu ne peux même pas te retrancher derrière ta créativité pour faire illusion. Il va te falloir aller chercher tes lecteurs/trices un à une ! Et tu vas devoir te former un peu pour élaborer un petit plan marketing.

La distribution de ton livre sera aussi un saut d’obstacles, mais on le détaillera un peu plus bas.

Et pour finir, tu seras seul face à la gestion de tes droits d’auteurs et de tes obligations fiscales. Là encore, tu devras te former.

Coûts initiaux :

A priori, l’autoédition, ça ne coûte pas cher. Enfin pas trop. Avec un petit budget de départ, vous pouvez faire vivre votre livre. À condition de réaliser la plupart des étapes vous-même ! C’est-à-dire bénévolement !

Par contre, si vous voulez vous entourer, vous allez être très vite confronté à une inflation du coût de production de votre livre ! Du correcteur, en passant par le graphiste et jusqu’aux services de distribution, l’ardoise sera vite salée.

Alors, comment faire ? Le mieux est d’évaluer ce que vous pouvez prendre en charge vous-même (vous avez des notions, quelques compétences, etc.) et ce que vous ne pouvez vraiment pas faire !

Dans tous les cas, ça vous coûtera : raisonnablement sur le plan du budget si vous vous débrouillez bien, mais follement en ce qui concerne le temps, l’investissement, etc. Mieux vaut être prévenu.

Visibilité limitée :

Bon. Le marché du livre est déjà ultrasaturé. L’autoédition rend plus précaire la visibilité de ton livre dans une niche hyper concurrentielle où, parfois, les livres se vendent comme des boîtes de haricots verts.

Tu n’auras ni le soutien presse des maisons d’édition ni leur puissance de feu en marketing. Ton livre est un peu comme une bouteille jetée à la mer qui espère trouver son lecteur.

Tu auras l’occasion de participer à certains salons du livre qui acceptent les auteurs autoédités (il y en a peu), mais tu devras lutter pour attirer l’attention du lecteur potentiel, surtout si ton livre n’appartient pas à un genre littéraire bien défini.

Il te reste les grandes plateformes comme Amazon KDP, Kobo, Apple Books ou Google Play, mais la concurrence y est féroce. Tu te heurteras aussi, de fait, à l’absence des lecteurs et lectrices qui boycottent les Gafas.

Crédibilité :

C’est sans doute le point d’achoppement de l’autoédition. Le pire du pire.

Tu n’as aucune crédibilité. Tu n’as pas passé l’épreuve d’un comité de lecture ni du choix par une maison d’édition. Tu t’auto-déclares auteur ou autrice. En France, c’est catastrophique, voire rédhibitoire.

Tes amis vont te rire au nez. Certains auront un petit sourire condescendant quand tu diras que tu écris. Bref, c’est l’humiliation.

Cet état de fait n’arrive pas de rien. Pendant longtemps, les maisons d’édition ont joué un vrai rôle dans le soutien aux auteurs/trices, et leurs compétences artistiques se montraient totalement légitimes.

Les cartes ont été rebattues avec l’arrivée du numérique et le rachat de grandes maisons d’édition par de grands groupes dont, pour la plupart, le profit est la première ambition.

À partir de là, des bestsellers sont apparus en autoédition, le marché a été bouleversé, et beaucoup de maisons d’édition se sont mises à prendre moins de risque.

Mais pour le grand public — le lecteur, la lectrice —, tu bénéficies d’un a priori négatif. Malheureusement, on ne peut rien y faire.

Distribution limitée :

La plupart du temps, tu n’auras pas accès aux librairies physiques. La plupart d’entre elles refusent les livres autoédités. D’une part, car elles ne sont pas sûres de les vendre ni sûres de leur qualité, et d’autre part parce qu’elles n’ont déjà plus de place avec tout ce qui arrive des éditeurs traditionnels. C’est à peu près mort pour toi.

Les distributeurs (genre Hachette) n’enregistreront pas ton livre. Sauf si tu passes par des plateformes de services comme Librinova ou Bookelis, qui, moyennant finances, permettent l’enregistrement de ton ouvrage. Mais les sommes (entre 200 € et 350 € par an, pour que le libraire ait ton ouvrage dans sa base de données et qu’il soit commandable) pourront paraître sévères pour beaucoup d’auteurs autoédités.

Tu peux mettre en vente ton livre sur la plateforme de vente en ligne d’Amazon. Tu auras une visibilité mondiale, mais la concurrence est féroce. Et tu devras accepter de pactiser avec l’ogre libéral que toutes les librairies et maisons d’édition française honnissent.

Les autres plateformes comme Kobo, Apple Books ou Google Play, te permettent aussi cette option, mais elles sont très en retard par rapport à Amazon et tu auras les mêmes problèmes.

Pour l’impression des livres, le mieux pour l’autoédité reste l’impression à la demande. Tu n’as pas à gérer les stocks chez toi, et le livre n’est imprimé que lorsque quelqu’un veut le lire. C’est pratique, mais c’est plus cher. La part qui te restera sur la vente du livre sera considérablement réduite par rapport à une impression en grand nombre.

Les livres autoédités peuvent avoir une distribution plus limitée, surtout dans les librairies physiques. La plupart des ventes se font en ligne, ce qui peut limiter l’accès à certains segments de lecteurs.

Marketing et promotion :

Bon. Comme en général, l’autoédité n’a pas d’argent, il n’a pas de budget pour la promotion. Bye bye les pubs, les interviews dans les médias, etc.

Il te reste tout ce qui est alternatif : les réseaux sociaux, les blogs, la communauté de lecteurs, le bouche-à-oreille.

C’est pour ça que les commentaires, les retours positifs des lecteurs sont ton arme. Et leur investissement dans le bouche-à-oreille, ta planche de salut.

Qualité variable :

C’est le corollaire du manque de moyen. La qualité du livre peut ne pas être là. Que ce soit la mise en page, l’impression, la couverture, etc. Il en va de même pour la relecture et les fautes d’orthographe. Tu seras jugé non seulement sur ton contenu artistique, mais aussi sur tout le reste.

Si le produit final n’est pas à la hauteur des attentes des lecteurs, cela peut nuire à ta réputation, et tu peux ne jamais t’en relever.

Gestion des retours et des critiques :

Comme la plupart de ta communication passera par les réseaux sociaux ou internet, tu devras gérer en direct les retours de tes lecteurs/trices, là où les maisons d’édition, la plupart du temps, servent de tampons.

L’impact émotionnel peut être destructeur. Tout le monde sait qu’une critique méchante suffit à détruire une dizaine d’avis positifs. Et sur les réseaux, les commentateurs/trices ne vont souvent pas avec le dos de la cuiller.

Selon ton contenu, tu peux subir des attaques frontales et malveillantes qui peuvent aller jusqu’au harcèlement. Tu auras aussi affaire aux trolls : des individus masqués ou des robots qui publient en rafale des avis négatifs sans fondement, et souvent sans avoir lu ton livre.

Tout cela peut détruire ta réputation, ou du moins l’entacher sérieusement.

Moralité : prévois un budget psy. On ne sait jamais.

Complexité administrative :

Tu devras gérer tes droits d’auteur. Et souvent, au préalable, protéger ton œuvre en la déposant.

Tu devras d’occuper des ISBN (tu sais ce code à plein de chiffres qui est sur le dos du livre…). En France, ils s’achètent.

Tu devras tenir tes comptes si tu gagnes de l’argent, et ne pas oublier de le déclarer aux impôts. Et donc, voir sous quel statut tu travailles : Artiste auteur, autoentrepreneur, etc. Chaque statut a ses règles fiscales.

Bref, il vaut mieux se former un peu sur la comptabilité, le droit et les réglementations en vigueur. Sinon, il peut t’en coûter très cher !

Risque financier :

Tu vois bien, parvenu(e) à ce dernier point dans ta lecture, qu’il va falloir que tu investisses. Entre la formation sur la réglementation, la fabrique du livre (corrections, design, édition…), l’impression, les ISBN, la protection de l’œuvre, la publicité en ligne, etc., tu devras tout de même ouvrir le porte-monnaie !

Et tu n’as aucune garantie de retour sur investissement ! Tes ventes sont imprévisibles et il y a même beaucoup de chance qu’elles ne couvrent pas ton investissement de départ !

Pour conclure

Alors oui, l’autoédition c’est magique. C’est-à-dire que ça peut très mal tourner comme un sort raté d’Harry Potter. Il est important pour les auteurs de bien peser les avantages et les inconvénients avant de choisir cette voie. Sinon, tu peux te retrouver dans le désert, sans argent et complètement déprimé.

Je me suis moi-même démoralisé en écrivant cet article.

Si l’autoédition offre de nombreuses libertés, elle comporte également des défis significatifs.

« Cependant, pour vaincre un point d’honneur qui combat contre toi,

Laisse faire le temps, ta vaillance et ton roi »

Pierre Corneille, Le Cid

Ta vaillance et le temps seront tes alliés si tu les domptes. Quant à ton roi, choisis qui tu veux…

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